Nos salades.
LES SALADES.
Dans ma jeunesse, après les premières légères décrues de novembre ou décembre de la Dordogne, mes parents m'amenaient ramasser une salade dont la rivière avait le secret de ventiler la graine , de la faire pousser dans du beau sable tout propre près de ses rives.
Je ne connais pas le nom en Français de cette salade que mes parents et les riverains appelaient en patois "Lo Bolodsière".
Déguster cette salade de janvier à début mars, c'était un délice avec de l'huile de noix; avec des crêpes, c'était un régal. Dans le sable, le coeur était blanc et tendre, les feuilles petites vertes et rougeâtres dégageaient à la fois un goût et un petit parfum au palais, de sauvage. Cette salade toute propre par le courant de la rivière, respirait l'oxygène au maximum, car à l'époque, elle ne subissait aucun polluant;elle n'était souillée par aucun animal ou individu. Elle était respectée; c'était la nature même. Au mois de mars cette salade montait en formant au centre une tige qui fleurissait et qui donnait ensuite des graines qui tombaient et qui attendaient que la rivière les prenne, les transporte par ses crues pour les faire naître dans le sable en fin d'année suivante. C'était la rivière qui possédait cette graine;c'est elle, qui la ressemait pour la faire renaître; c'était le cycle perpétuel jusqu'au jour où les barrages ont interdit à la Dordogne de sortir de son lit. Cette dernière ,par vengeance, a supprimé sa salade, inconnue des gens des villes. Dans le Lot, dans le temps, on savait cultiver le goût, le vrai goût des aliments, des aliments naturels, des aliments qui ne connaissaient pas les produits toxiques et les pesticides.
Ce mardi, 22 janvier 2O13, j'ai réussi à retrouver deux vieux pieds de "bolodsière" à Pinsac à 5O mètres environ du bord de la Dordogne. Cette salade résiste par endroit; sa graine attend désespérément une inondation pour aller pousser sur un joli tas de sable, bien propre, afin de naître après l'inondation.
Voici les deux photos.
Si les feuilles peuvent ressembler à des feuilles de pissenlit quand les pieds sont vieux, elles différent lorsqu'elles repoussent et en outre, ces vieux pieds mettent une tige sur laquelle se mettent à pousser des petits pieds de salade qui est très tendre et savoureuse au goût Elles poussent vite puis se mettent en fleurs et finissent en graines Passé ce temps; la tige vient à sécher comme on peut l'observer dans la photo suivante. Cette tige est centrale, elle sèche, mais le pied demeure vivant tout en vieillissant pendant plusieurs années.
On distingue, en regardant bien, le pied de cette salade avec sa tige centrale. En Français, on pourrait l'appeler "la baladeuse" car le balais en patois c'est "lo boladse". En effet puisque cette salade se baladait au bord de la Dordogne au grès des crues de cette dernière.